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Réflexions

La solidarité dans l’adversité

Originalement publié sur Les Affaires

Des entrepreneurs en larmes parce qu’ils font face à l’impensable, j’en ai entendu ces derniers jours. Ici, la propriétaire d’une agence de voyages qui cumule les annulations et voit s’envoler en une semaine les revenus d’un an de labeur. Là, une hôtelière qui a subitement perdu 95% de sa clientèle.

Et pas trop loin, un propriétaire d’entreprise de divertissement qui a dû cesser ses activités et mettre tout son monde au chômage… C’est le lot de plusieurs PME en ce moment. Et c’est le lot de plus grandes entreprises aussi. Le stress et les larmes vont gagner d’autres entrepreneurs avec la mise en pause pour trois semaines de toute activité non essentielle.

Gilles Fortin, le grand bâtisseur de Tristan, a dû fermer ses boutiques la semaine dernière et envoyer tous ses employés — 700 — vers l’assurance-emploi, selon ce que j’ai entendu samedi à la radio de Radio-Canada. Le chiffre d’affaires de Tristan a dégringolé de 90% en cinq jours, à partir de ce fameux vendredi 13 mars. Il ne reste que sa famille pour assurer le traitement des ventes en ligne. Mais ça ne compensera pas les pertes. Quarante-cinq boutiques à travers le Canada, c’était 1,2 M$ de loyers par mois. Le gouvernement Legault ayant finalement ordonné la fermeture des centres commerciaux dimanche, les détaillants malmenés par la crise sont désormais en meilleure posture pour obtenir un congé de paiement de leurs bailleurs. N’empêche, ils ont une quantité de stocks qui sera difficile à vendre quand les gens resserrent leurs dépenses, frappés ou menacés par une perte d’emploi.

Devant l’adversité, plusieurs ont pris de bonnes initiatives. Reports de taxes par les villes, possibilité de congé de paiement hypothécaire par les banques, Hydro-Québec ne débranche plus pour retard de paiement, les gouvernements allongent des dollars supplémentaires en soutien. Certains bailleurs donnent une plus grande latitude. La grande question: jusqu’où on s’endette pour passer à travers la crise? Plusieurs voient bien que l’économie ne sera plus la même quand on pourra reprendre nos activités régulières. Et personne ne sait combien de temps ça va durer.

Meilleur antidote

Devant cette grande incertitude, l’entraide est le meilleur antidote au désespoir, à défaut d’avoir un remède pour le virus. En Gaspésie, un bureau de notaires a lancé un défi à tous ceux qui ont les reins plus solides ou qui sont moins affectés par la crise, d’acheter 5 chèques cadeaux de 50$ à des entreprises locales pour les aider à garder des liquidités. Les chèques cadeaux peuvent être remis à des employés.

À Sherbrooke, une avocate en droit de la famille offre ses services gratuitement – qu’est-ce qui arrive avec les pensions alimentaires quand le chômage frappe? À Québec, des propriétaires immobiliers ont organisé, avec des restaurateurs qui doivent fermer leurs établissements, une collecte de nourriture et un service de livraison vers les banques alimentaires. Les initiatives se multiplient.

À l’École d’entrepreneurship de Beauce, nous avons dû fermer nos portes temporairement, alors nous offrons des sessions d’entraide dans le monde virtuel. Nous sommes témoins de plusieurs coups de pouce à ces occasions.

L’un a soudainement trop de main-d’œuvre, l’autre en manque; on redirige temporairement. Une pharmacienne manque de produits nettoyants, elle rencontre un nouveau fournisseur dans le groupe qui peut l’aider. Chacun partage aussi ses trucs et astuces pour survivre à la crise et la simple possibilité de ventiler et d’entendre que personne n’est seul dans le bateau est réconfortante.

Alors ma question du jour: que ferez-vous à brève échéance pour tisser un peu plus serrée encore l’indispensable solidarité face à cette extrême adversité économique imposée par le coronavirus?